Cannes 2020, Gérardmer 2021, 5 (en vrai 4) ans après le touchant Willy 1er, les frères Boukherma sont de retour dans nos salles faiblement éclairées. Un film faisant suite au très sympathique court métrage La Naissance d’un Monstre (Clermont Film Fest de 2018).

Teddy en deux mots (ou presque)
Dans les Pyrénées, un loup attise la colère des villageois.Teddy, 19 ans, sans diplôme, vit avec son oncle adoptif et travaille dans un salon de massage. Sa petite amie Rebecca passe bientôt son bac, promise à un avenir radieux. Pour eux, c’est un été ordinaire qui s’annonce. Mais un soir de pleine lune, Teddy est griffé par une bête inconnue. Les semaines qui suivent, il est pris de curieuses pulsions animales…
Teddy, on l’aime bien quand même ce p’tit gars
Il n’est jamais simple de s’approprier un mythe tel que celui du Loup-garou. On ne compte plus les itérations dans toutes les formes de l’art possible et imaginable. Les frères Boukherma ont décidé ici de placer tout d’abord leur récit de nouveau dans un milieu rural, celui du sud-ouest de la France.
C’est d’ailleurs une des grandes forces de leur cinéma, cette capacité à parler avec tendresse et sensibilité de ce petit village, de ses habitants, qu’ils soient en quête de quitter cette vi(e)(lle), de ceux qui cherchent à vivre paisiblement, comme ceux qui cherchent à tromper l’ennui.
C’est dans ce contexte que Teddy, reclus de cette micro-société, grandit tout en se transformant petit à petit en loup-garou. Dès le premier plan du film où on le voit, la véritable séparation entre tout le monde et lui est effectué. Il y a d’un côté le troupeau d’habitants du village, et de l’autre, Teddy, seul, isolé, à la fois dans sa bulle et en même temps dans cet espoir d’ouverture et peut-être un jour, être accepté.
Teddy, c’est également l’expression même de la dualité humaine. Le côté bon et le mauvais, qui, plus avance le film, plus cette dualité est exacerbée. Le gentil Teddy est celui qui est amoureux fou de sa copine, qui aide son oncle et sa tante, qui tente de s’intégrer à une soirée avec des bacheliers BCBG en espérant avoir des amis de son age.
Et il y a le Teddy qui devient petit à petit un loup-garou qui va céder a ses pulsions les plus animales pour se venger du monde. De la personne qui l’a harcelé, qui l’a trompé, menti.
Stephen King et les contes de la cryptes ne sont pas loin…
Ce qui est vraiment plaisant dans Teddy, c’est cette volonté de ne jamais être dans un démonstratif du monstre mais plutôt de raconter cette transformation. Une transformation longue, dure mentalement. Si on ressent une dimension Dr Jekyll et Mr Hyde dans cette dualité du personnage, c’est du côté de Stephen King que Les frères Boukherma s’inspirent également, avec un déroulé scénaristique prenant des relents d’un Carrie par exemple.
Et cette volonté de se poser, d’avoir une ambiance qui devient de plus en plus pesante jusqu’à exploser, c’est, en plus d’être le meilleur choix de progression possible pour le film, la possibilité de pouvoir également poser au mieux sa caméra, de pouvoir se concentrer sur le quotidien du personnage, de l’environnement et des personnes qui l’entoure, et de pouvoir également expliquer cette transformation.
Ce n’est jamais renversant de mise en scène ou de montage, mais c’est maîtrisé de bout en bout pour notre plus grand plaisir. Le film joue de plus avec toute une dimension de body horror qui fonctionne plutôt bien !
Au final, Teddy est une belle petite réussite, lorgnant à la fois sur un cinéma d’horreur mais aussi un cinéma de comédie, jouant avec brio sur les deux genres. On retrouve comme précédemment dans l’oeuvre du duo un vrai regard sensible sur la ruralité, qui fonctionne ici tout autant. Une nouvelle belle réussite pour le cinéma de genre français !

Teddy
- Réalisateur : Ludovic Boukherma et Zoran Boukherma
- Scénariste : Ludovic Boukherma et Zoran Boukherma
- Avec Anthony Bajon, Christine Gautier, Ludovic Torrent, Noémie Lvovsky…
- Musique : Amaury Chabauty
- Direction artistique : Linda Yi
- Costumes : Clara René
- Photographie : Augustin Barbaroux
- Durée : 88 minutes
- Production : Baxter Films, Les film Velvet
- Distribution : The Jokers